Starshooter chez les autres: vous pouvez écouter le disque. Starshooter chez vous: vous pouvez rejoindre leur grande tournée. Mais chez Starshooter? Seul best pouvait quelque chose pour vous. Et n'a donc pas hésité à dépêcher Bill Schmock et Jean-Yves Legras à Lyon ( avec réduction tarif couples SNCF) pour capturer Kent, Phil, Mickey et Jello dans le décor quotidien des instants de répits laissés par leur existence de baladins électriques.

Il n'existe tout simplement pas d'autres groupes comme Starshooter. Et si, jusqu'à présent, leur démarche n'a pas toujours été bien comprise, c'est que, peut-être justement, ils sont différents. Les seuls à n'avoir à n'avoir jamais eu de complexes face à leur création et, surtout, face au monstre anglo-saxon. Cette démarche se concrétise avec les années comme pour donner au rock français une identité. Une identité française. Et sans cocorico, s'il vous plaît. c'est vrai que de tous les groupes français , Starshooter est sûrement celui qui a le plus de personnalité. Le plus français des groupes français. Les quatre de Lyon sont porteurs d'un son, d'une image, d'une culture et d'un esprit français. cherchez ailleurs un équivalent, Starshooter est unique. A plusieurs titres. Deux mois avant leur tournée française, je les ai retrouvés à Lyon. J'ai vu un groupe en pleine santé, un groupe qui bouge et qui bouge bien. Un groupe qui fait son truc sans passer par les circuits habituels du business. Un groupe autonome plein de vie et d'idées. Sur les quais du Rhône, Starshooter a ses bureaux ; ils y ont aménagé un studio de répétition et disposent d'un entrepôt pour le matériel. Starshooter a crée deux sociétés : l'une, Macho, défend les intérêts du groupe ; l'autre, SPM, a plusieurs activités : importation, vente et location de matériel, services de sonorisation et d'éclairage. Ces deux sociétés font vivre dix personnes : les quatre du groupe, Phil, Kent, Jello et Mickey, Gilles (manager), David (sonorisateur), Jean-pierre (tour-manager), Fred (éclairage), Franckie " sleepy " (matériel ", Julien (retours). Certains ont tout juste dix-huit ans, d'autres, les tout nouveaux qui aident en attendant de devenir actionnaires de l'entreprise Starshooter, ont à peine seize ans. Tous sont associés dans ses sociétés : techniciens comme musiciens, du plus petit au plus grand, touchent le même salaire à la fin du mois (le smic). Il n'y a pas de problème d'égo chez Starshooter, on vit et on donne le meilleur de soi-même pour les mêmes intérêts. Une jolie leçon de savoir vivre. Alors pour mieux connaître la recette, voici une interview de Kent et Phil réunis ainsi qu'une manière de curriculum vitae en forme de fan club : Starshooter chez eux. Bill : pourquoi avoir fait ce groupe au départ, vous avez pris le rock comme une contre-culture une culture qui vous appartenait ? Kent : Oui, ça c'est important. C'était une somme de rebellions vis à vis de la musique de mes parents et d'un tas de choses. Parce qu'ils n'avaient pas de musique, déjà, ils regardaient la télé, écoutaient la radio. Moi j'avais mon pick-up et j'écoutais mes trucs à moi et, plus fort je les écoutais, plus ils me disaient de baisser le son. Cela dit, je n'ai jamais été vraiment en guerre avec mes parents, mais le rock, c'était vraiment un truc à moi. On faisait du bruit, on gênait les vieux et c'était super. C'est con mais c'est ça. Phil : Moi c'est typique de la contre-culture. J'ai été élevé pendant 15 ans avec une certaine culture, une certaine musique et le rock est arrivé pour moi juste au moment où j'attaquais la crise d'adolescence. Je discutais tout ce que mes parents avaient fait, ce qu'ils étaient et c'était la musique dont ils ne voulaient pas entendre parler ; Je n'avais pas le droit de lire des BD, il fallait que j'écoute mes disques en cachette, ils ne voulaient pas que je répète avec le groupe, au début. Alors, je suis rentré à fond dedans à cause de ça parce que c'était un moyen de rebellion et de contre-culture complet. Kent : A l'école déjà, il n'y avait pas beaucoup de mecs branchés à l'époque. Ca te mettait à part. T'étais dans les marginaux, c'était un plaisir, t'étais la bête, et tout. On ne disait même pas du mal de toi parce que les autres étaient tellement coincées ; qu'à la limite, ils t'admiraient. T'était le premier à porter des disques, des jeans, et à te laisser pousser les cheveux . A l'époque, c'était ça, par rapport à l'école, c'était mettre les pieds sur le bureau, ça fait penser un peu à ça ; Arriver en chantant des trucs des Creedence alors que les autres pensent à leur devoir de math ; C'est la classe, quoi. A treize ans, c'était ça, un an après, on montait le groupe. Je ne sais pas pourquoi on a monté ce groupe, le plaisir de faire du bruit, de gueuler. Je ne siais pas, c'est vraiment parce qu'on n'avait rien à foutre des mercredis et des week-ends. En plus, il y avait une promesse de vie. La vie que menait tous ces mecs : c'était carrément fou quand tu lisais Best ou Extra, les trucs qu'ils pouvaient raconter là dessus, le studio, les bagnoles, et tout ça. Phil : C'est plus pour ça, finalement, que pour la musique, au début ; on a lu Best et Rock & Folk très vite. Quand on lisait ou quand on voyait les photos des mecs sur scène, ça nous faisait rêver. La scène, surtout. Je crois que c'est pour ça qu'on a fait le groupe. Vivre autrement que tu peux attendre quand t'es au lycée. Bill : C'est aussi ça qui t'a donné envie d'écrire des textes, Kent ? Kent : Des tas de choses me donnent envie d'écrire. Soit ce sont des trucs qui me sont arrivés ou qui sont arrivés à d'autres et ça me tient à cœur de les raconter, soit, parfois, des faits qui ne sont pas précis, ce ne sont pas des petites histoires mais une idée ou une humeur qui traîne dans l'air. Ca me fait chier, alors il faut que je le raconte à tout prix. Ca peut être aussi à partir d'un mot qui me sera tombé dessus en chantant la mélodie. Bill : Tu écris pour toi avant tout ou pour faire passer quelque chose ? KENT : Ah, j'ai envie que les gens comprennent. De plus en plus parce que, justement, j'ai l'impression qu'ils ne comprennent pas. J'ai l'impression de dire des trucs trop compliqués mais je ne veux pas simplifier non plus parce que j'ai l'impression que ça ne sera pas ça. Je voudrais arriver à ce que les gens comprennent que le fait qu'un chanteur prenne position, c'est important. Bon, après, la forme, c'est important mais le principal, peu importe si on partage ses idées ou non, c'est qu'il prenne position. Je ne vois pas l'intérêt de raconter des trucs comme ça, à froid. C'est la variété. Bill : te considères-tu comme un bon parolier ? Kent : je ne suis jamais satisfait de mes textes avant qu'on me le dise ( rire ). C'est-à-dire que, quand on enregistre un disque, généralement, le texte évolue, les mots changent, jusqu'à la dernière prise. Si je ne les enregistrais pas, ils changeraient continuellement. Le studio, c'est un peu le frein, on met la chanson sur une voie de garage. Alors, si un jour on me dit : tu es un bon parolier, je veux bien le croire, je me donne assez de mal pour ça. Phil : Moi, je le considère comme un super parolier. Il faudra sûrement plus de temps qu'on le croyait, au début, pour que les gens comprennent ne serait-ce qu'ils acceptent de passer le barrage qui fait que le rock est toujours considéré comme une forme d'expression mineure. Les gens reconnaissent ce qu'ils appellent des " textes " chez les gens comme Brel, Brassens, Vian ; il va falloir une certaine période pour qu'ils commencent à chercher ailleurs, chez des paroliers comme Aubert ou justement, Kent qui parle de leur époque comme Brel ou Brassens l'ont fait à la leur. Alors, c'est évidemment une autre façon de penser et de parler mais je considère que les gens qui, pour l'instant, font quelque chose de nouveau au niveau des textes, se trouvent dans des groupes comme Téléphone ou Starshooter. Le rock, c'est le meilleur moyen de faire passer ce que tu veux dire aujourd'hui, c'est aussi le plus grand dénominateur commun entre nous quatre. Un type ne pourrait plus passer ses textes aujourd'hui avec la musique qu'avait Brel à l'époque, ça n'aurait plus le même impact. On a besoin aujourd'hui d'une violence sonore. STARS ? Bill : Qu'est-ce que ça représente pour vous, Starshooter, aujourd'hui ? Kent : ça représente toujours autant qu'avant. Avant , j'étais déjà persuadé qu'on était différent des autres et, plus ça va, plus ça me paraît évident. Ce que j'aimerais, maintenant, c'est arriver à faire comprendre aux gens ce qu'on est car j'ai la conviction qu'on apporte quelque chose de nouveau. Cela dit, si dans deux ou trois ans on en est toujours au même point, je suis prêt à arrêter parce que ça ne vaut pas le coup non plus de sacrifier toute une vie là-dessus.C'est un concept, malgré tout, une approche spéciale de la musique mais c'est quand même pas non plus primordial dans une vie même si, pour l'instant, je suis à fond dedans. On a toujours en horreur des poétes maudits, les gens qui disaient : mon génie n'est pas reconnu ! Bon, ben, il est pas reconnu, ferme ta gueule, va ailleurs, c'est pas la peine. Quand on aura donné tout ce qu'on pouvait pour faire passer un truc, si ça ne passe pas, ça ne passera pas. C'est pas la peine de continuer, d'autant plus qu'on est quatre musiciens mais on est dix en tout, une petite famille à vivre là-dessus. On ne va pas continuer à se serrer la ceinture, à faire bosser des types pour pas grand-chose, juste pour nos beaux yeux. Pour l'instant, ça va très bien, on y croit tous mais, dans trois ans, si on est au même stade et qu'on y croit encore comme des fous, c'est qu'on est marteau. On aura 27 berges et, à ce stade, on a passé un cap. Pour moi, c'est une autre génération. Cela dit, on va se battre complètement pour faire passer notre truc. Bill : Tu parles d'un point de vue commercial ? Kent : Oui, parce qu'au point de vue artistique, je ne doute pas du tout. L'évolution qu'on a, moi, ça me plaint bien. On a fait des erreurs mais j suis très content de faire des erreurs. Quand on a commencé, on n'était pas des bon, on n'a pas galéré pendant des années avant, ça s'est fait tout de suite alors qu'on était pas du tout mûrs. Notre maturité, on se la fait au fur et à mesure. Si on a fait des erreurs, c'est parce qu'on était comme des mômes, on se plantait parce qu'on essayait plein de trucs qui nous tentaient mais on n'avait rien de précis en tête et si ça n'allait pas, on faisait autre chose sans opportunisme ni arrivisme. S'il y a arrivisme, c'est à un niveau commercial du marketing, de promotion. Quand on fait notre disque, on se dit pas : ça va marcher ou pas. On le fait le mieux qu'on peut et, de toute façon, on est persuadé que ça va marcher. Mais on ne change rien pour arriver à ça. C'est après qu'on essaie de pousser à fond parce qu'il faut qu'on vive malgré tout. On ne changera pas notre musique pour arriver au but mais, avec cette musique là, on essaiera d'atteindre ce but. De vivre le mieux possible et j'imagine que c'est ce à quoi tout le monde aspire. Personne ne cherche à se mettre dans la merde, personne ne crache sur l'argent. Faut pas déconner, tu peux bien crier ce que tu veux. D'ailleurs Valérie Lagrange le dit très bien dans une chanson : " haïr l'argent, haïr les riches et le dire en chantant, c'est un moyen de devenir riche, à quoi ça sert… ". C'est super ça. A un certain stade, on ferait mieux de se taire, quand on vend trois cent mille albums en chantant mort aux bourgeois, on ferait mieux de se taire… Le vedettariat, c'est une situation tellement ambiguë. C'est tellement difficile de rester fidèle à ses convictions. Quand des types viennent te trouver à la fin des concerts, par exemple, et que tu essaies de leur faire comprendre que tu es comme eux, que tu vis comme eux, c'est encore pire, je m'en suis aperçu, ils te mettent encore plus sur un piédestal, ils se disent : Ah ! Celui-là, il n'est pas comme les autres ! C'est un cercle vicieux. Bill : Est-ce que vous rêvez d'être des stars ? Kent : C'est quoi ? Etre des stars, c'est-à-dire vivre comme Mick Jagger, un jour à New-York, le lendemain à Londres, ça, à la limite, c'est marrant. Acheter une Rolls pour la mettre dans la piscine, moi, c'est pas du tout ça. Acheter une maison en forme de guitare, à quoi ça sert ? Se sortir des super canons, c'est pas mon truc. Phill : Moi, si par exemple. Kent : Si j'ai une occase, je ne dis pas que je dormirais dans la baignoire mais c'est pas mon plan. Je ne vais pas m'afficher avec des super mannequins. Si je n'ai pas envie de sortir maintenant, ça n'est pas pour le faire si j'en ai les moyens. Aller à l'Elysée-Matignon et tout, je m'emmerde moi là-bas. De toute façon, j'ai l'impression que ça se perd vachement cette histoire de star. Un mec comme Bernie, c'est pareil, avec, le fric qu'il a, j'ai l'impression qu'il " roule pas le but ". P'tit Louis non plus. Bill : Et la mort de Lennon alors ? Kent : Ca m'a touché dans le sens que je trouve complètement aberrant de tuer un type qui fait de la musique, soit qu'on ne partage pas les mêmes idées, soit par fanatisme, pour l'avoir pour soi. Ça peut sans doute se comprendre en psychanalyse mais je n'arrive pas à l'imaginer. Bon, ça n'est pas inquiétant parce qu'il y eut des meurtres aussi cons. Je crois que c'est la première rock-star qu'on tue, c'est un nouveau pas Franchi dans la débillité. Le lendemain de la mort de Lennon, on avait un concert, on n'a pas fait " Get Baque ". Notre attitude vis-à-vis des Beattles, de ce qu'ils représentent n'a pas changé, mais ça va trop loin. J'avais l'impression que si on jouait " Get Bacque ", on prenait partie pour ce mec là. Les Beattles ne se reformeront plus, c'est déjà ça, c'est pas la peine de se mettre les pieds dans le plat. C'est fini pour nous et puis ça va trop loin, tu peux critiquer un type, le traiter de tous les noms mais de là à le tuer ! Je ne peux plus dire les beattles, c'est de la merde, déjà qu'avant les gens ne comprenaient pas, il a fallu s'expliquer pendant des années, alors si tu le dis maintenant, ça ne passera plus du tout. C'est malsain et ça ne sert à rien, on ne le fera plus. C'est charognard, c'est se vautrer dans les cadavres, c'est dégueulasse. A ce sujet-là, c'est comme les gars qui lancent des canettes sur scène ou des bouteilles en verre, parfois pleines. C'est ma grande théorie, je pourrais écrire un bouquin là-dessus. Les types doivent savoir qu'ils peuvent te faire mal, ce dont ils ne se rendent peut-être pas compte, c'est que si la bouteille arrive bien sur la tête, elle peut te tuer. Ça veut dire que, dans la salle il y a des mecs capables d'en tuer un autre parce qu'il joue une musique qui ne leur plaint pas. C'est quand même dur ça. Moi, ça me rend fou. Je n'arrive pas à comprendre ce qui se passe dans la tête d'un mec quand il essaye de viser celle d'un gars sur scène. Il se dit : il m'fait chier, il m'fait chier et vlan ! la canette. C'est pas une télé, la télé, elle est cassée, t'en rachètes une autre. Là, tu tue quelqu'un, tu supprimes une vie parce que le gars n'a pas tes idées. Et encore, ce sont des idées musicales, c'est dérisoire la musique, ça vaut pas le coup de tuer des gens pour ça. C'est complètement fou. Que des types se tuent pour la religion, c'est déjà complètement con, pour des frontières, ça me fait marrer, mais pour la musique ! Bill : Est-ce qu'il vous arrive d'imaginer justement ce que vous Serez à 40 ans ? Kent : Moi, il m'arrive de l'imaginer dans un monde normal, enfin dans celui qu'on a connu jusqu'à maintenant. Ce que je pourrais être à 40 ans, je le vois assez bien. Je pense que je continuerai plus ou moins dans la voie que j'ai choisie, tout en respectant mon âge. A 40 ans, si je continue à faire de la musique, ce sera celle d'un type de 40 ans. Je n'essaierai pas de danser sur une scène pour les teenagers. Ou alors j'écrirai peut-être des bouquins. Je me vois dans un truc comme ça mais dans un monde normal, je dis bien. Parce que là, tel que c'est parti, je ne crois pas que j'atteindrai les 40 ans, c'est tellement la merde , tout fout le camp et c'est de pire en pire. Si ça se trouve, on sera dans une ère glaciaire parce que la terre sera complètement détraquée ou alors je serais dans un camp de prisonnier ou dans une usine derrière une machine parce que les valeurs artistiques n'auront plus aucun sens. Ou je serais général. On peut tout imaginer. Phil : j'envisage effectivement deux solutions : ou un monde qualifié de " normal " où je sais que je me démerderai parce que je me sens assez fort pour ça ; ou un monde qualifié " d'anormal " et là, je crois que ma vie actuellement, le fait de vivre seul, sans attache familiale ou matérielle, c'est un peu le reflet d'une peur de cette situation-là. Devoir se battre pour survivre dans un monde où, si tu as un môme ou quoique ce soit, t'es un homme mort. Si tu es seul, tu peux te débrouiller, tu peux survivre. Au fond de moi, je crois que c'est quelque chose qui joue énormément sur ma position vis à vis du foyer. Je sais que je peux m'accommoder de toutes les situations, si je suis seul. CULTE Bill : croyez-vous en dieu ? Kent : Avec tout ce qui se passe dans le monde, s'il faut croire encore à dieu. Il faut vraiment être naze parce que, ou c'est un alcoolique, ou il est aveugle. Vraiment, je ne comprends pas comment on peut croire en dieu avec la merde qu'il y a partout. Justement l'escroquerie qui marche depuis deux mille ans, c'est qu'il faut croire en dieu quand on est dans la merde, il ne viendra pas mais si tu crois en lui, tu seras pardonné. Pardonné d'avoir souffert. On peut difficilement faire mieux comme slogan, le type qui l'a trouvé, il a fait fort. Je crois en des trucs mais c'est abracadabrant, ça ne tient pas debout. Cela dit, ça peut t'arriver du jour au lendemain ; La foi, ça ne se saisit pas, c'est une révélation. Je crois que c'est quelque chose de très fort. c'est pour ça que le catéchisme, c'est carrément ridicule. Si j'ai un môme, je ne le ferai pas baptisé, j'ai fait ma communion alors je suis soi-disant catholique. Mon cul, je ne suis pas d'accord avec le culte catholique, pas plus qu'avec les autres d'ailleurs. C'est de l'escroquerie pour moi, la prière en groupe, bouffer les hosties, ça ne me concerne pas. Pour l'instant je ne jure de rien, ça peut me tomber dessus. Phil : Moi non plus, ça ne me concerne pas pour l'instant. Pourtant, à un certain stade de ma vie, j'ai l'impression que, si je me décidais à croire, je pourrais croire. J'imagine très bien que je pourrais prendre une décision finale, m'enfermer dans une vie monastique totalement coupée du monde matériel, pour m'attaquer au problème. L'idée de croire en dieu m'excite assez. Bill : Et Coluche, vous allez voter pour lui ? Phil : Ouais, ouais, ouais. Kent : Je me pose des questions encore. S'il commence à se prendre au sérieux, non, parce qu'il ne sera plus drôle. En fait, ce qui me fait chier dans les élections, c'est que, comme toujours, quand tu dois prendre une décision qui peut changer ta vie, tu te défiles dans l'abstentionnisme, comme ça, tu dis qu'au moins tu ne seras pas responsable si c'est la merde. C'est un état d'esprit de plus en plus courant chez les gens de notre génération. Alors, c'est la question que je me pose actuellement, on est dans une période critique, je suis persuadé ou j'essaie de me persuader que c'est aussi merdique d'un côté que de l'autre mais, après tout, tant qu'à faire autant essayer quelque chose de nouveau. Ce qui me gêne avec Coluche, c'est que les gens se sont trouvés une excuse, il y a des tas de mecs qui vont voter pour lui de façon à se décharger d'une responsabilité. Moi, j'hésite encore. Je n'ai jamais voté auparavant parce que ça ne m'intéressait pas du tout, ça continue à ne pas m'intéresser mais je me dis que si je persiste à m'en désintéresser dans les situations graves, c'est que je suis vraiment un naze. C'est le moment ou jamais de prendre ses responsabilités. Bill : Si des types de 18 ans formaient un groupe et enregistrait un 45 tours qui se foutrait de vous à l'instar de " Get Baque " quelle serait votre réaction ? Kent : Je les produirais, comme ça, ils seraient dans la merde. Ils seraient obligés de se contredire. Phil : Je crois que ça n'aurait pas une grande signification. Nous, on s'est attaqué à un mythe, ils se planteraient, déjà qu'on n'a pas vendu beaucoup de " Get Baque ". En plus descendre Starshooter, ça se fait quand même assez couramment alors que les Beattles, c'était plutôt rare. Si un groupe a l'idée de faire ça, son intérêt est de l'abandonner parce que ça ne lui importerait pas grand chose. C'est le meilleur conseil à lui donner. A côté de ça, il nous mettrait sur un sacré piédestal. Bill : Votre opinion sur le rock français Kent : Moi, je trouve qu'il se porte bien, qu'il pourrait se porter mieux. pas seulement au niveau des groupes, il y en a de bons et moins bons, mais il faut surtout que les goûts du public s'élargissent. Encore une fois, l'exemple de l'Angleterre est complètement frappant : quelque soit la panoplie du mec qui va au concert, il écoute trente-six formes de rock. En France, le rock, c'est le hard pour l'instant et ça me fait chier. C'est pour ça que d'autres groupes se plantent que les gens vont bouder Lilly Drop ou même Bijou. Le hard, OK, je suis pour mais pas que ça. Quand il n'y a que ça, c'est affolant, c'est comme pour tout si tu n'as pas le choix, c'est pas la peine de continuer à faire de la musique. Il faut que les autres existent aussi, n'importe quoi , même des trucs que je n'aime pas. Le hard est loin d'être une de mes musiques préférées mais il faut que ça existe, il n'y a pas de problèmes, comme le reste, les expériences, les machins au synthé, le novo-rock et tout le toutim. Tout ça, il faut que ça vive. C'est important, ça fait une émulsion un brassage. La musique pour la musique, pas pour le genre. Tant que les gens ne l'accepteront pas, le rock français ne bougera pas. Bill : Voilà une phrase définitive. ________________________________________Bill SCHOMCK